• KIT AUTOMNE 19

    KIT AUTOMNE 19


    À une artiste

    Puisque les plus heureux ont des douleurs sans nombre,
    Puisque le sol est froid, puisque les cieux sont lourds,
    Puisque l’homme ici-bas promène son cœur sombre
    Parmi les vains regrets et les courtes amours,

    Que faire de la vie ? Ô notre âme immortelle,
    Où jeter tes désirs et tes élans secrets ?
    Tu voudrais posséder, mais ici tout chancelle ;
    Tu veux aimer toujours, mais la tombe est si près !

    Le meilleur est encore en quelque étude austère
    De s’enfermer, ainsi qu’en un monde enchanté,
    Et dans l’art bien aimé de contempler sur terre,
    Sous un de ses aspects, l’éternelle beauté.

    Artiste au front serein, vous l’avez su comprendre,
    Vous qu’entre tous les arts le plus doux captiva,
    Qui l’entourez de foi, de culte, d’amour tendre,
    Lorsque la foi, le culte et l’amour, tout s’en va.

    Ah ! tandis que pour nous, qui tombons de faiblesse
    Et manquons de flambeau dans l’ombre de nos jours,
    Chaque pas à sa ronce où notre pied se blesse,
    Dans votre frais sentier marchez, marchez toujours.

    Marchez ! pour que le ciel vous aime et vous sourie,
    Pour y songer vous-même avec un saint plaisir,
    Et tromper, le cœur plein de votre idolâtrie,
    L’éternelle douleur et l’immense désir.

    Louise Ackermann, Premières poésies, 1871

     

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  • KIT AUTOMNE 18

    KIT AUTOMNE 18

    Aux femmes

    S’il arrivait un jour, en quelque lieu sur terre,
    Qu’une entre vous vraiment comprît sa tâche austère,
    Si, dans le sentier rude avançant lentement,
    Cette âme s’arrêtait à quelque dévouement,
    Si c’était la Bonté sous les cieux descendue,
    Vers tous les malheureux la main toujours tendue,
    Si l’époux, si l’enfant à ce cœur ont puisé,
    Si l’espoir de plusieurs sur Elle est déposé,
    Femmes, enviez-la. Tandis que dans la foule
    Votre vie inutile en vains plaisirs s’écoule,
    Et que votre cœur flotte, au hasard entraîné,
    Elle a sa foi, son but et son labeur donné.
    Enviez-la. Qu’il souffre ou combatte, c’est Elle
    Que l’homme à son secours incessamment appelle,
    Sa joie et son appui, son trésor sous les cieux,
    Qu’il pressentait de l’âme et qu’il cherchait des yeux,
    La colombe au cou blanc qu’un vent du ciel ramène
    Vers cette arche en danger de la famille humaine,
    Qui, des saintes hauteurs en ce morne séjour,
    Pour branche d’olivier a rapporté l’amour.

    Et que votre cœur flotte, au hasard entraîné,
    Elle a sa foi, son but et son labeur donné.
    Enviez-la ! Qu’il souffre ou combatte, c’est Elle
    Que l’homme à son secours incessamment appelle,
    Sa joie et son espoir, son rayon sous les cieux,
    Qu’il pressentait de l’âme et qu’il cherchait des yeux,
    La colombe au cou blanc qu’un vent du ciel ramène
    Vers cette arche en danger de la famille humaine,
    Qui, des saintes hauteurs en ce morne séjour,
    Pour branche d’olivier a rapporté l’amour.

    Paris, 1835

    Louise Ackermann, Premières poésies, 1871

     

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  • 2020

    2020

    Les écoliers

    Sur la route couleur de sable
    En capuchon noir et pointu,
    Le « moyen », le « bon », le « passable »
    Vont à galoches que veux-tu
    Vers leur école intarissable.

    Ils ont dans leur plumier des gommes
    Et des hannetons du matin,
    Dans leurs poches, du pain, des pommes,
    Des billes, ô précieux butin
    Gagné sur d'autres petits hommes.

    Ils ont la ruse et la paresse
    – Mais l'innocence et la fraîcheur –
    Près d'eux les filles ont des tresses
    Et des yeux bleus couleur de fleur
    Et de vraies fleurs pour la maîtresse.

    Puis les voilà tous à s'asseoir
    Dans l'école crépie de lune,
    On les enferme jusqu'au soir
    Jusqu'à ce qu'il leur pousse plume
    Pour s'envoler. Après, bonsoir !

    Ça vous fait des gars de charrue
    Qui fument, boivent le gros vin,
    Puis des ménagères bourrues
    Dosant le beurre et le levain.
    Billevesées, coquecigrues,
    Ils vous auront connues en vain
    Maurice Fombeurre


     

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