• ETE 15


    ETE 15


    Fleurs d’aurore

    Comme au printemps de l’autre année,
    Au mois des fleurs, après les froids,
    Par quelque belle matinée,
    Nous irons encore sous bois.

    Nous y verrons les mêmes choses,
    Le même glorieux réveil,
    Et les mêmes métamorphoses
    De tout ce qui vit au soleil.

    Nous y verrons les grands squelettes
    Des arbres gris, ressusciter,
    Et les yeux clos des violettes
    À la lumière palpiter.

    Sous le clair feuillage vert tendre,
    Les tourterelles des buissons,
    Ce jour-là, nous feront entendre
    Leurs lentes et molles chansons.

    Ensemble nous irons encore
    Cueillir dans les prés, au matin,
    De ces bouquets couleur d’aurore
    Qui fleurent la rose et le thym.

    Nous y boirons l’odeur subtile,
    Les capiteux arômes blonds
    Que, dans l’air tiède et pur, distille
    La flore chaude des vallons.

    Radieux, secouant le givre
    Et les frimas de l’an dernier,
    Nos chers espoirs pourront revivre
    Au bon vieux soleil printanier.

    En attendant que tout renaisse,
    Que tout aime et revive un jour,
    Laisse nos rêves, ô jeunesse,
    S’envoler vers tes bois d’amour !

    Chère idylle, tes primevères
    Éclosent en toute saison ;
    Elles narguent les froids sévères
    Et percent la neige à foison.

    Éternel renouveau, tes sèves
    Montent même aux coeurs refroidis,
    Et tes capiteuses fleurs brèves
    Nous grisent comme au temps jadis.

    Oh ! oui, nous cueillerons encore,
    Aussi frais qu’à l’autre matin,
    Ces beaux bouquets couleur d’aurore
    Qui fleurent la rose et le thym.

    Nérée Beauchemin, Les floraisons matutinales

     

     

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  • KIT PRINTEMPS 10

    KIT PRINTEMPS 10


     Les Roses

    Le Printemps rayonnant, qui fait rire le jour
    En montrant son beau front, vermeil comme l’aurore,
    Naît, tressaille, fleurit, chante, et dans l’air sonore
    Éveille les divins murmures de l’amour.

    O Sylphes ingénus, vous voilà de retour!
    De mille joyaux d’or la forêt se décore,
    Et blanche, regardant les corolles éclore,
    Titania folâtre au milieu de sa cour,

    A travers l’éther pur dont elle fait sa proie,
    Tandis que la lumière, éclatante de joie,
    Frissonne dans la bleue immensité des cieux.

    Beauté qui nous ravis avec tes molles poses,
    Dis, n’est-ce pas qu’il est doux et délicieux
    De plonger follement ta bouche dans les roses?

    Novembre 1888

    Théodore de Banville, Dans la fournaise, 1892

     

     

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  • KIT PRINTEMPS 9

     

    KIT PRINTEMPS 9



    Les Soleils de Mai

    D’un souffle virginal le plus aimé des mois
    Emplit l’air ; le lilas aux troncs moussus des bois
    Suspend sa grappe parfumée ;
    Les oiseaux sont joyeux et chantent le soleil ;
    Tout sourit ; du printemps, tout fête le réveil :
    Toi seule es triste, ô bien-aimée !

    « Pourquoi ces yeux rêveurs et ce regard penché ?
    De quel secret ennui ton cœur est-il touché ?
    Qu’as-tu ma grande et pâle Amie,
    Qu’as-tu ? Vois ce beau ciel sourire et resplendir !
    Oh ! souris-moi ! Je sens mon cœur s’épanouir
    Avec la terre épanouie.

    « Sur le cours bleu des eaux, au flanc noir de la tour,
    Regarde ! l’hirondelle est déjà de retour.
    Ailes et feuilles sont décloses.
    C’est la saison des fleurs, c’est la saison des vers.
    C’est le temps où dans l’âme et dans les rameaux verts
    Fleurissent l’amour et les roses.

    « Soyons jeunes ! fêtons le beau printemps vainqueur !
    Quand on est triste, Amie, il fait nuit dans le cœur ;
    La joie est le soleil de l’âme !
    Oublions ce que l’homme et la vie ont d’amer !
    Je veux aimer pour vivre et vivre pour aimer,
    Pour vous aimer, ma noble Dame !

    « Loin de nous les soucis, belle aux cheveux bruns !
    Enivrons-nous de brise, et d’air et de parfums,
    Enivrons-nous de jeunes sèves !
    Sur leurs tiges cueillons les promesses des fleurs !
    Assez tôt reviendront l’hiver et ses rigueurs
    Flétrir nos roses et nos rêves ! »

    Et, tandis qu’il parlait, muette à ses côtés,
    Marchait la grande Amie aux regards veloutés ;
    Son front baigné de rêverie
    S’éclairait à sa voix d’un doux rayonnement ;
    Et, lumière de l’âme, un sourire charmant
    Flottait sur sa lèvre fleurie.

    Auguste Lacaussade, Poèmes et Paysages, 1897


     

     

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