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Par sylvie erwan le 1 Mai 2018 à 08:30
Premier mai
Tout conjugue le verbe aimer. Voici les roses.
Je ne suis pas en train de parler d'autres choses.
Premier mai ! l'amour gai, triste, brûlant, jaloux,
Fait soupirer les bois, les nids, les fleurs, les loups ;
L'arbre où j'ai, l'autre automne, écrit une devise,
La redit pour son compte et croit qu'il l'improvise ;
Les vieux antres pensifs, dont rit le geai moqueur,
Clignent leurs gros sourcils et font la bouche en coeur ;
L'atmosphère, embaumée et tendre, semble pleine
Des déclarations qu'au Printemps fait la plaine,
Et que l'herbe amoureuse adresse au ciel charmant.
A chaque pas du jour dans le bleu firmament,
La campagne éperdue, et toujours plus éprise,
Prodigue les senteurs, et dans la tiède brise
Envoie au renouveau ses baisers odorants ;
Tous ses bouquets, azurs, carmins, pourpres, safrans,
Dont l'haleine s'envole en murmurant : Je t'aime !
Sur le ravin, l'étang, le pré, le sillon même,
Font des taches partout de toutes les couleurs ;
Et, donnant les parfums, elle a gardé les fleurs ;
Comme si ses soupirs et ses tendres missives
Au mois de mai, qui rit dans les branches lascives,
Et tous les billets doux de son amour bavard,
Avaient laissé leur trace aux pages du buvard !
Les oiseaux dans les bois, molles voix étouffées,
Chantent des triolets et des rondeaux aux fées ;
Tout semble confier à l'ombre un doux secret ;
Tout aime, et tout l'avoue à voix basse ; on dirait
Qu'au nord, au sud brûlant, au couchant, à l'aurore,
La haie en fleur, le lierre et la source sonore,
Les monts, les champs, les lacs et les chênes mouvants,
Répètent un quatrain fait par les quatre vents.
Victor HUGO (1802-1885)
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Par sylvie erwan le 28 Avril 2018 à 08:15
Premier soleil
Italie, Italie, ô terre où toutes choses
Frissonnent de soleil, hormis tes méchants vins !
Paradis où l’on trouve avec des lauriers-roses
Des sorbets à la neige et des ballets divins !Terre où le doux langage est rempli de diphthongues !
Voici qu’on pense à toi, car voici venir mai,
Et nous ne verrons plus les redingotes longues
Où tout parfait dandy se tenait enfermé.Sourire du printemps, je t’offre en holocauste
Les manchons, les albums et le pesant castor.
Hurrah ! gais postillons, que les chaises de poste
Volent, en agitant une poussière d’or !Les lilas vont fleurir, et Ninon me querelle,
Et ce matin j’ai vu mademoiselle Ozy
Près des Panoramas déployer son ombrelle :
C’est que le triste hiver est bien mort, songez-y !Voici dans le gazon les corolles ouvertes,
Le parfum de la sève embaumera les soirs,
Et devant les cafés, des rangs de tables vertes
Ont par enchantement poussé sur les trottoirs.Adieu donc, nuits en flamme où le bal s’extasie !
Adieu, concerts, scotishs, glaces à l’ananas ;
Fleurissez maintenant, fleurs de la fantaisie,
Sur la toile imprimée et sur le jaconas !Et vous, pour qui naîtra la saison des pervenches,
Rendez à ces zéphyrs que voilà revenus,
Les légers mantelets avec les robes blanches,
Et dans un mois d’ici vous sortirez bras nus !Bientôt, sous les forêts qu’argentera la lune,
S’envolera gaîment la nouvelle chanson ;
Nous y verrons courir la rousse avec la brune,
Et Musette et Nichette avec Mimi Pinson !Bientôt tu t’enfuiras, ange Mélancolie,
Et dans le Bas-Meudon les bosquets seront verts.
Débouchez de ce vin que j’aime à la folie,
Et donnez-moi Ronsard, je veux lire des vers.Par ces premiers beaux jours la campagne est en fête
Ainsi qu’une épousée, et Paris est charmant.
Chantez, petits oiseaux du ciel, et toi, poète,
Parle ! nous t’écoutons avec ravissement.C’est le temps où l’on mène une jeune maîtresse
Cueillir la violette avec ses petits doigts,
Et toute créature a le coeur plein d’ivresse,
Excepté les pervers et les marchands de bois !Théodore de Banville (1823-1891)
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Par sylvie erwan le 21 Avril 2018 à 08:00
Primevère de printempsVeillés par une primevère solitaire
nous nous sommes retrouvés à la lisière du monde.
Les pétales nous regardaient surpris
la terre encore blanche de neige
les rayons du soleil embrumés.
L’hiver est parti, tu l’as senti.
Nous avons osé le désir éphémère
ensemble
nous nous sommes laissés éblouir.
La chaleur de tes mains m’a caressée sans me toucher
pétale primitif
Ton regard m’a modelée
neige de printemps
Ton souffle a enluminé mon âme
rayon de certitudes
Tes mots ont su, pour un instant, orner notre futur
Eternellement embrumé.
Sybille Rembard, Bauté Fractionnée, 2002
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