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Par sylvie erwan le 23 Décembre 2023 à 07:35
Soir d’hiver
Ah ! comme la neige a neigé !
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah ! comme la neige a neigé !
Qu’est-ce que le spasme de vivre
À la douleur que j’ai, que j’ai !
Tous les étangs gisent gelés,
Mon âme est noire : Où vis-je ? Où vais-je ?
Tous ses espoirs gisent gelés :
Je suis la nouvelle Norvège
D’où les blonds ciels s’en sont allés.
Pleurez, oiseaux de février,
Au sinistre frisson des choses,
Pleurez, oiseaux de février,
Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,
Aux branches du genévrier.
Ah ! comme la neige a neigé !
Ma vitre est un jardin de givre.
Ah ! comme la neige a neigé !
Qu’est-ce que le spasme de vivre
À tout l’ennui que j’ai, que j’ai !…
Emile Nelligan
Œuvres poétiques complètes I : Poésies complètes 1896-1941
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Par sylvie erwan le 15 Décembre 2023 à 07:35
Solstice d’hiver
je me souviens
c’était le solstice d’hiver, et la mer était haute,
et sombre la lumière
je me souviens des vagues s’enroulant sur la jetée,
et des oiseaux de nuit
de longs cheveux de varechs noirs, d’écumes grises
et de l’horizon rouge
je me souviens des couleurs de la nuit.
Dans une brasserie de front de mer, au plus intime
de la grande salle,
ayant trouvé refuge, et heureux,
je me souviens, et c’est le solstice d’hiver.
Viennent alors sur nous de grands nuages, depuis les golfes cantabriques,
la mer se met à crépiter
je prends dans mes mains ton visage, et je te dis :
« tu es heureuse »
tu souris.
Villebramar, décembre 2018
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Par sylvie erwan le 2 Décembre 2023 à 07:32
Un village
Des murs crépis, de pauvres toits,
Un pont, un chemin de halage,
Et le moulin qui fait sa croix
De haut en bas, sur le village.
Les appentis et les maisons
S’échouent, ainsi que choses mortes.
Le filet dort : et les poissons
Sèchent, pendus au seuil des portes.
Un chien sursaute en longs abois ;
Des cris passent, lourds et funèbres ;
Le menuisier coupe son bois,
Presque à tâtons, dans les ténèbres.
Tous les métiers à bruit discord
Se sont lassés l’un après l’autre
Derrière un mur, marmonne encor
Un dernier bruit de patenôtres.
Une pauvresse aux longues mains,
Du bout de son bâton tâtonne
De seuil en seuil, par les chemins ;
Le soir se fait et c’est l’automne.
Et puis viendra l’hiver osseux,
Le maigre hiver expiatoire,
Où les gens sont plus malchanceux
Que les âmes en purgatoire.
Emile Verhaeren, Toute la Flandre
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