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Par sylvie erwan le 5 Mars 2022 à 07:35
Attente
Il nous a attaché, là, à la barrière
Sans même un regard en arrière
Et s'est engouffré dans un bâtiment
En criant : pas bouger, autoritairement.
Assis sur le trottoir, côte à côte
Les yeux fixés sur la porte
Nous attendons anxieusement
Attentifs au moindre déplacement.
Les passants de loin, nous regardent.
Les enfants, attirés se hasardent
A venir fourrager de leurs petites mains
Notre épaisse fourrure, couleur lin.
Patiemment, nous nous laissons caresser
Notre maître nous a bien dressé.
La porte s'ouvre. Vers nous, il s'avance
Se met à genoux, et avec exubérance
Nous félicite et nous caresse
Et nous libère de nos laisses.
Dominique Sagne
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Par sylvie erwan le 1 Mars 2022 à 08:00
Poème Mardi gras
Aussi fou qu'un essaim de guêpes,
Car il ne faut pas qu'on s'y trompe,
Mardi-gras, qui mange des crêpes,
Est venu, sonnant de la trompe.
Donc, mon ami Paul, et toi, Lise,
Amusez-vous. Ce qu'on achève
Et qu'à propos on réalise,
N'est plus dans le pays du rêve.
Mais n'allez pas au bal. C'est triste.
C'en est fini du Veau qui tette,
Et lointain comme un guitariste,
Chicard n'est plus qu'une épithète.
Donc, Lise, dont le fier corsage
Cache mal un sein couleur d'ambre,
Et toi, Paul, croyez un vieux sage:
Faites le bal dans votre chambre.
Amants fiers de porter des chaînes,
Dansez un pas naturaliste!
Voyagez aux rives prochaines,
Comme le veut mon fabuliste.
Je le sais bien, moi que la Muse
A dressé pour son dithyrambe,
En nul endroit on ne s'amuse
Mieux que devant un feu qui flambe.
Pour le carnaval, trop précaire,
Il faut pourtant qu'on se déguise;
Si l'on veut, en Robert Macaire,
Et s'il le faut, en duc de Guise.
Toi, Paul, mets ta chemise russe,
Et toi, Lise aux charmantes poses,
Déguise-toi, pleine d'astuce,
En femme qui met des bas roses.
Et soupez! Lise, fleur humaine,
Si l'on peut t'adorer comme ange,
Pour imiter le fils d'Alcmène
Il est essentiel qu'on mange.
Si tu veux que Paul sur tes lèvres
Se livre aux plus tendres sévices,
Sur une assiette de vieux Sèvres
Épluche-lui des écrevisses.
Et pour mêler toutes les joies,
Commande, ô guerrière jalouse,
La fine terrine de foies
Gras, chez Tivollier de Toulouse.
L'Éden, il faudrait que tu l'eusses,
O femme du ciel émanée!
Pour cela, bois du Lur Saluces
Après un peu de Romanée.
O Paul, sois prévoyant! Profite
Du temps où tu n'es pas obèse,
Et tandis que Lise t'invite,
Baise sa bouche, et la rebaise.
Car ce bonheur, que tu répètes,
Vaut bien les douleurs éternelles
D'entendre hurler des trompettes
Et de voir des polichinelles!
5 mars 1889.
Théodore De Banville
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Par sylvie erwan le 27 Novembre 2021 à 07:55
Ô jeune Florentine
Ô jeune Florentine à la prunelle noire,
Beauté dont je voudrais éterniser la gloire,
Vous sur qui notre maître eût jeté plus de lys
Que devant Galatée ou sur Amaryllis,
Vous qui d’un blond sourire éclairez toutes choses
Et dont les pieds polis sont pleins de reflets roses,
Hier vous étiez belle, en quittant votre bain,
À tenter les pinceaux du bel ange d’Urbin.
Ô colombe des soirs ! moi qui vous trouve telle
Que j’ai souvent brûlé de vous rendre immortelle,
Si j’étais Raphaël ou Dante Alighieri
Je mettrais des clartés sur votre front chéri,
Et des enfants riants, fous de joie et d’ivresse,
Planeraient, éblouis, dans l’air qui vous caresse.
Si Virgile, ô diva ! m’instruisait à ses jeux,
Mes chants vous guideraient vers l’Olympe neigeux
Et l’on y pourrait voir sous les rayons de lune,
Près de la Vénus blonde une autre Vénus brune.
Vous fouleriez ces monts que le ciel étoilé
Regarde, et sur le blanc tapis inviolé
Qui brille, vierge encor de toute flétrissure,
Les Grâces baiseraient votre belle chaussure !
Mai 1842.
Théodore de Banville, Les Cariatides (1842)
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