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Par sylvie erwan le 27 Octobre 2018 à 08:20
Onguent d’Organdi
A la rouille du soir une plume de sang
Retouche l’horizon d’une ride de soie,
Qu’une ombre de sépia saupoudre de sa joie,
Près d’un port dilué dans le fard d’un étang.
Des nuages gantés d’une peau de mustang,
Piaffent le long des rocs où la lumière aboie
D’un dernier cri badin qu’une lune d’or noie
Dans un bassin d’argent, sous la dent d’un écang.
D’une bulle de menthe à la saveur d’orange,
Naît l’ivresse des nuits que la pulpe d’un ange
Distille dans la mer comme un philtre envoutant.
Le paradis déploie une ombrelle en dentelle
Et la moire du ciel s’ourle d’un diamant
Dont l’éclat brille alors d’une paix éternelle.
Francis Etienne Sicard, Lettres de soie rouge, 2011
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Par sylvie erwan le 13 Octobre 2018 à 08:35
La cité natale
Heureux qui dans sa ville, hôte de sa maison,
Dès le matin joyeux et doré de la vie
Goûte aux mêmes endroits le retour des saisons
Et voit ses matinées d’un calme soir suivies.
Fidèles et naïfs comme de beaux pigeons
La lune et le soleil viennent sur sa demeure,
Et, pareille au rosier qui s’accroît de bourgeons,
Sa vie douce fleurit aux rayons de chaque heure.
Il va, nouant entre eux les surgeons du destin,
Mêlant l’âpre ramure et les plus tôt venues,
Et son coeur ordonné est comme son jardin
Plein de nouvelles fleurs sur l’écorce chenue.
Heureux celui qui sait goûter l’ombre et l’amour,
De l’ardente cité à ses coteaux fertiles,
Et qui peut, dans la suite innombrable des jours,
Désaltérer son rêve au fleuve de sa ville.
Anna de Noailles, Le coeur innombrable
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Par sylvie erwan le 6 Octobre 2018 à 08:25
Le ber
La campagne, comme autrefois,
Avec le bahut, et le coffre,
Et l’armoire à vitrail, nous offre
Le ber à quenouilles de bois.
Dans le coeur d’un merisier rouge,
L’aïeul a taillé les morceaux ;
Et la courbe des longs berceaux
Illustre la naïve gouge.
Que la mère y couche un garçon,
Ou qu’une mioche y respire,
L’orgueil n’y voit que le sourire
Et la vigueur du nourrisson.
Sur la paille de ce lit fruste,
Les marmots auront un sommeil
Qui, tels l’air pur et le soleil,
Rend plus beau, plus frais, plus robuste.
Aux angles du salon fermé,
Le mobilier poudreux se fane,
Mais dans l’alcôve paysanne,
Le ber ancien n’a pas chômé.
Ce qu’il berce avec tant de joie,
Berce et berce, bon an, mal an,
Dans son bâti tout brimbalant,
C’est l’être que le ciel envoie.
C’est l’enfant de l’humble maison,
Nourri par la terre féconde
Où toute bonne graine abonde,
Et tout fructifie à foison.
Près du lit funèbre où l’ancêtre,
Le Christ aux doigts, fut exposé,
Au coeur du dernier baptisé,
Le vieux coeur français va renaître.
Et le toit natal, chaque jour,
Bénit la race triomphante
Dont la suite immortelle enfante
La vertu, la force, l’amour.
Nérée Beauchemin, Patrie intime
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